Défunt
Mohamed BOUDIAF Alias "Si Tayeb El-Watani"
Ancien Président du haut conseil d'État (du 01/1992
à 06/1992)
Ironie du destin : l'Algérie Officielle le rappelle, lui qui fut écarté et renié. Il vécut en exil pendant trente années; il fut confiant que l'Algérie avait besoin d'un projet qui n'existait ni au Front de Libération National , ni dans le courant de l'islam politique et que le pays vivait une crise de valeurs idéologique, culturelles, politiques et économiques.
Né le 23 juin 1919 à M'sila , Mohamed Boudiaf quitte les études pour des raisons sociales et s'engage très tôt dans la résistance. Dés son retour du service militaire forcé il rejoint les rangs du Parti du Peuple et par la suite le mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques comme responsable de la wilaya de Sétif en 1947. Dirigeant au sein de l'Organisation Secrète, responsable de la région de Constantine, les autorités françaises le jugent par contumace, après la dissolution de l'Organisation.
Responsable à la Fédération française en1953 , il annonce son opposition à Messali Hadj, puis il passe outre les conflits des centralistes et des messalistes et contribue à la naissance du Comité Révolutionnaire pour l'Unité et l'Action. Emprisonné en 1950, il réussit à s'évader et entre dans la clandestinité.
Coordinateur des leaders historiques " les 6 ", il réussit à convaincre les centralistes de la nécessité d'accélérer le déclenchement de la révolution, avec comme date prévue : le 1er novembre 1954.
Pendant la révolution, Si Tayeb El Watani était le responsable de la région de l'Ouest Algérien, chargé de l'encadrement, de l'organisation, de l'approvisionnement et de la coordination des wilayas. Il fut arrêté lors de l'interception de l'avion qui transportait les leaders du F.L.N le 22 octobre 1956. Il sera libéré après le cessez-le-feu en mars 1962.
Il est Vice-président du gouvernement provisoire de la République Algérienne (GPRA), membre du Conseil National de la Révolution Algérienne depuis le congrès de la Soumam, ministre d'état et membre du bureau politique en juillet 1962 . Mais, au lendemain de l'indépendance, il entre en désaccord avec Ben Bella. Il démissionne de ses fonctions en 1962. Il s'oppose à la dictature du parti unique, il condamne la déviation du pouvoir et la politique de la répression suivie contre l'opposition et fonde le Parti de la Révolution Socialiste en Septembre 1962. Arrêté puis libéré en 1963, il choisit l'exil , en Europe puis au Maroc.
Il soutient alors la position du Maroc concernant la question du Sahara Occidental et maintient ce point de vue même lorsqu'il devient Président du Haut Conseil de l'État. Ce soutient va de pair avec sa vision politique et sa lutte pour un Maghreb uni.
La constitution de son parti le 20 septembre 1962 était le fruit de circonstances exceptionnelles et sa conversion à l'opposition fut le résultat de " son refus d'appuyer la déviation et sa condamnation des dépassements du Président Ben Bella et le monopole du F.L.N., de l'ensemble des prérogatives et sa déviation vers un régime à parti unique et centralisé.".
Après son arrestation et son emprisonnement pendant trois mois dans l'extrême sud algérien, il choisit le Maroc comme terre d'exil et poursuit son opposition.
A la suite du décès de Houari Boumediene, il gèle toutes ses activités politiques " je ne pensais pas que Houari Boumediene jouissait de toute cette popularité ", dira-t-il. Il vécut réfugié en exil , renié par l'Algérie Officielle. Il était certain d'après un de ses proches que lorsqu'il accepta les propositions des deux ministres Ali Haroun et Aboubekr Belkaid, il disait sa fin serait en Algérie et qu'il les connaissait très bien et qu'il se méfiait toujours d'eux.
Rentré à Alger pour présider le Haut Comité d'État en janvier 1992, il lutte contre la corruption, et s'engage à relancer le processus démocratique, suscitant un immense espoir dans l'opinion. Il est sauvagement assassiné le 29 juin 1992 six mois plus tard à Annaba. La télévision transmet le meurtre en directe. Il fut le seul civil qui gouverna l'Algérie à l'exception de Ben Bella qui représentait une exception à la règle.
Le tribunal d'Alger déclare que l'assassinat de Mohamed Boudiaf n'avait pas de raisons politiques mais le garde du corps, l'officier Boumarafi, recruté a la dernière minute et chargé de la protection du Président, agit par instinct personnel !.
La commission provisoire chargée de l'enquête condamne la manière dont l'affaire fut traitée en comparaison à la stature et la position de Boudiaf, tout en éloignant l'hypothèse d'une action individuelle et isolée et en constatant la négligence dont ont fait preuve les services de la sécurité chargée de la protection du Président .
Le Président Boudiaf venait de déclarer expressément qu'il allait poursuivre toutes les parties en accusation dans les affaires de détournement de fonds et des affaires de pots de vins qu'elle que soit leur position. Mais les parties qui avaient l'habitude des pratiques de l'élimination corporelle et d'isoler tout obstacle humain et sans qu'on puisse dévoiler leur identité réussirent à l'atteindre.
L'épouse du défunt accuse la mafia politico-financière d'avoir assassiné son mari.
L'Annuaire Politique
de l'Algérie 2000